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Pourquoi un tel blogue ?

Pourquoi un tel blogue ?

 

Bonjour tout le monde,

Il m’est arrivé une réflexion assez inhabituelle ces derniers jours. À dire vrai, jamais je ne vous ai expliqué pourquoi j’ai voulu être un modèle vivant pour les écoles d’art, ni, d’autre part, celles qui m’ont incité à concevoir ce blogue.

Chose étrange ! J’en conviens parfaitement étant donné le fait que j’alimente ce blogue depuis plus d’une décennie en y publiant des articles, accompagnés par des clichés ou d’autres créations de bon goût que mes fidèles collaborateurs, notamment des photographes professionnels ou amateurs, acceptent de partager avec moi.

Depuis que je suis enfant, j’aime l’art sous toutes ses formes. Je songe en particulier au domaine musical puisque les membres de ma fratrie ont été des admirateurs de groupes populaires à l’époque de leurs jeunesses. Je revis, en pensées, les moments où les chansons des Beatles, des Rolling Stones, d’Alice Cooper, de Pink Floyd, sans négliger les chanteurs francophones pareils que Michel Fugain, Salvatore Adamo et Joe Dassin, sans oublier les Québécois tels que Diane Dufresne et Joe Bocan ainsi que Robert Charlebois qui ont enjolivé par leurs présences vocales les douces soirées du temps jadis.

À cela vient s’ajouter ma passion pour le dessin, la peinture et la sculpture, et ce, sans omettre mon admiration pour les œuvres des grands maîtres. Il est à noter que j’ai eu la chance de visiter des galeries tant au Québec qu’en Suisse.

Vous devez certainement vous douter que l’art constitue pour moi, comme tous les individus possédant en eux la fibre, une manière d’exprimer mes émotions, mes idées et ma personnalité. C’est également une façon de me rapprocher d’autrui, en partageant ma vision du monde, et ce tout en découvrant de nouveaux regards sur la réalité.

Or, c’est à la suite de mes recherches sur l’eugénisme, dans le cadre de ma formation universitaire en théologie, que j’ai appris que les nazis, il est important de retenir ce fait, avaient utilisé les arts, en particulier les nus, dans la promotion de la pureté à la fois raciale et physiologique.

Un tel élément m’a affecté du fait que je suis un survivant de la thalidomide. En effet, ce produit aurait été, semble-t-il, composé dans les laboratoires de l’armée du IIIe Reich, sous l’égide du docteur Otto Ambrose, comme antidote au gaz sarin, et ce, sous les ordres d’Adolf Hitler.

Quand j’ai appris qu’il existait des modèles vivants pour les écoles d’art, j’ai été aussitôt attiré par cette activité. J’ai vu dans le fait de poser nu devant des étudiants en art l’occasion de contribuer à la création artistique, de soutenir d’une manière originale à la formation de futurs artistes, et surtout de me mettre au défi. N’oublions pas qu’il est rarissime qu’une personne vivant avec un handicap physique visible s’aventure dans ce monde. J’avais donc décidé de devenir un modèle vivant, et je n’ai jamais regretté mon choix. Toutefois, c’est avec l’aide d’une amie de Montréal que j’ai pu m’immiscer au sein de cette communauté.

Poser nu devant des inconnus m’a été somme toute assez aisé, et ce, pour plusieurs raisons. En effet, ma confiance en moi, en mon corps, et en mon image s’est souvent manifestée au fil des années, essentiellement grâce à l’amour et à l’appui inconditionnel de mes défunts parents. Voilà pourquoi j’ai toujours fait preuve de professionnalisme, de respect, et de discrétion à chacune des sessions.

En tant que modèle vivant, je me sentais à la fois utile et valorisé. Je permettais aux étudiants en art d’apprendre davantage que les bases du dessin du fait de ma situation physique assez atypique, me rendant paradoxalement hétérogène et unique, et ce, tout en les inspirant, parfois à créer des œuvres tout à fait originales. En résumé, je les aidais à accroître leur sens de l’observation, leur technique de travail, sans oublier leur imagination.

Je n’ai jamais craint le regard des autres, au contraire, il m’arrive encore de le provoquer et de le défier. Il en a toujours ainsi de l’absence d’un quelconque complexe. Oui, je me sens indépendant et extraordinaire. Soyez rassurés ! Je suis tout de même conscient de mes défauts. D’ailleurs, je serai éternellement reconnaissant à mes défunts parents de m’avoir inculqué l’ouverture d’esprit, la curiosité et le sens de l’inventivité et de l’audace.

En conclusion, avoir été un modèle vivant pour les écoles d’art, mais également pour des artistes, fut une décision que j’avais prise par affection de l’art, par le besoin de participer à la création d’œuvres originales, et par goût du défi. C’est une démarche qui m’a rendu heureux, qui m’a fait grandir, et qui m’a permis d’aimer davantage la vie. C’est un choix que je ne suis pas près de regretter. Oh que non !

Malheureusement, j’ai été dans l’obligation de mettre un terme à de telles séances. Les raisons sont fort simples. Tout d’abord, la pandémie de covid-19 a été un désastre d’une ampleur indescriptible, non seulement sur le plan du travail, mais non moins sur celui des relations interpersonnelles. Ensuite, mes capacités physiques ont diminué au fil du temps. Hé oui ! Je vieillis comme tout le monde et je dois prendre conscience de mes limites. Enfin, j’ai découvert une approche tout aussi intéressante en publiant des œuvres poétiques où la nudité sera mise à l’honneur.

Là encore, je suis redevable envers mes défunts parents pour avoir inculqué en votre humble serviteur une passion qui lui colle à la peau et qui est celle de l’écriture, et ce, dans la langue de Molière. Est-il utile de vous rappeler que c’est un plaisir, que je qualifierais « orgasmique », de réussir à produire des poèmes ? Qui plus est ! C’est en m’inspirant d’œuvres photographiques réalisées par des gens avec qui j’ai développé, malgré une distance géographique impressionnante, une amitié formidable que cela est rendu possible.

Je vous remercie pour votre attention.

Rolland Jr St-Gelais de Québec au Canada

Mon corps nu dévoilé

Mon corps nu dévoilé

(Équilibre)

Depuis les premières bouffées d’air qui, dans mes poumons, m’ont donné la vie.

Formé ou plutôt massacré en silence dans l’auguste sein de ma mère,

Soyez rassurés amis! Loin est de moi l’idée de me plaindre d’être né ainsi.

Si il y une chose que l’on m’a appris, c’est bien d’avoir une volonté de fer.

Je vous présente mon corps avec fierté et bonheur.

Fier pour son unicité dans ce monde à la recherche de la perfection.

Mais aussi humble de par son histoire qui n’est pas sans heurts.

Un corps tel qu’il est et qui ne craint pas toutes les questions.

Un corps épris de liberté et qui aime du plus profond de son cœur pouvoir partager.

Partager avec les artistes qui n’ont de faire des opinions des soi-disant spécialistes.

De tous ces bureaucrates griffonnant imperturbablement tous ces noms sur des listes.

Et qui repartent sans état d’âme dans la monotonie de leurs foyers.

J’aime mon corps car il est le mien et non celui d’un héros.

Ce corps dont le sang rouge vif et qui gambade dans ses veines,

Prouve à tout ce peuple incrédule et à la nudité féminine qu’il est un hétéro.

Qui circule allègrement et sans gêne tel le courant sur la Seine.

Ce corps qui depuis des lustres affronte toutes les saisons avec un malin plaisir.

Du soleil estival qui lui réchauffe avec ses chauds rayons sa peau délicate,

Jusqu’à celui de monsieur hiver qui avec son froid mordant la rende écarlate,

Il ne cesse de vouloir vivre de jour comme de nuit et même d’en rire.

Oui, il m’arrive lorsque l’occasion se présente d’être pensif.

N’ayez crainte, être oisif n’est point le plus grand de mes défauts.

Je revoie toutes les femmes avec qui j’ai partagé les petits plaisirs jouissifs.

Et, tel un paon aux multiples couleurs, la queue se pointe bien haut.

N’éprouvais-je donc aucune gêne envers mes semblables? Me diriez-vous.

C’est, et je le jure en mon âme et conscience, tout le contraire. Détrompez-vous!

Croyez-moi sur parole! Démontrer que l’on peut être heureux est dans mes pensées.

Je suis conscient de toute la chance, Ô mon Dieu!, que j’aie.

De leurs yeux, les artistes ont scruté tous les recoins de mon physique.

Chaque détail vu pour y trouver ses multiples parcelles de beauté.

Il est vrai que ne suis point un Adonis et encore moins une créature épique.

Et pourtant, de ma dextérité, ils en furent vraiment étonnés.

Certes, mon corps n’a pas de mains et pourtant il peut caresser.

Certes, mon corps n’a pas de pieds mais il a parcouru des lieux extraordinaires.

Certes, mon corps n’a pas de langue mais il louange Dieu et veut le prier.

Et le remercier de lui avoir donné la chance de connaître cette vie spectaculaire.

Merci mon Dieu pour ce corps que tu as voulu ainsi.

Merci mon Dieu pour cette nature que tu me donnes.

Merci mon Dieu pour le soleil du Midi et la lune de minuit.

Merci mon Dieu pour ses yeux qui ont façonné en moi une autre personne.

De

Rolland St-Gelais

Québec (Québec)

Canada